Témoignage de Marie : instruire son enfant quand on a été phobique scolaire | Expérience IEF

Lorsque nous devenons parents, il arrive que notre propre enfance resurgisse. Lorsque nous sommes passés par des épreuves difficiles, nous avons d’autant plus envie d’en protéger nos enfants. Marie est amoureuse d’Emeric depuis 11 ans. Elle était déjà maman de Léa, née en 2006, aujourd’hui âgée de 12 ans, qu’elle a eue alors qu’elle était encore adolescente. De cet amour sont nés Ethan, il y a 3 ans (2015), et Louna, il y a un petit peu plus d’un an (2017). Cette famille de Seine-et-Marne a choisi d’instruire les deux cadets à domicile.


Son histoire…

Pour comprendre le choix de Marie, il faut commencer par comprendre son histoire. Son propre vécu de l’école a grandement influencé son choix de ne pas y inscrire deux de ses enfants. Son aînée est scolarisée, s’y est toujours épanouie. Bonne élève, elle est aujourd’hui première de sa classe et obtient les félicitations des professeurs. Pourtant, ses deux frères et sœurs n’iront pas à l’école de si tôt.

« Mon parcours scolaire a été chaotique ! »

Un père carriériste, assez absent, où les uniques échanges étaient basés sur l’école et les notes obtenues. Elle ressentait une pression importante sur les résultats. Elle cite : « Tu as eu des notes aujourd’hui ? 18, pourquoi tu n’as pas eu 20 ? Je te préviens en dessous de 15 de moyenne, on t’envoie en pension ! » . Les autres voies que la filière scientifique étant réservées aux « ratés » : lorsque sa sœur a obtenu son bac littéraire, il ne l’a pas félicitée.

Concernant son rapport à l’école, elle a été scolarisée à 3 ans. Elle raconte :

« Je pleurais tous les jours, j’avais des maux de ventre. Je prenais ça comme un abandon. Je ne comprenais pas ce que je faisais là, dans une salle pleine d’enfants, de bruits, de cris. Les exercices ne m’intéressaient pas, je connaissais déjà. Je m’ennuyais et restais prostrée dans un coin en attendant que les heures passent. »

A tel point que l’institutrice a convoqué ses parents pour leur dire qu’elle n’était pas prête, que son comportement n’était pas normal. Sa mère a alors pris la décision de la descolariser pour la remettre à l’école à l’âge de 5 ans. Dans une école privée catholique… « Je comprenais encore moins ce que je faisais là ! » dit-elle. Tout a recommencé. Pleurs, maux de ventre, vomissements faisaient parti du quotidien. Sauf que cette fois, ses parents lui ont dit qu’elle n’avait pas le choix, elle irait à l’école comme tout le monde.

« J’ai alors tenté de tout intérioriser. »

Une élève discrète, réservée, qui mettait tout en oeuvre pour ne pas se faire remarquer. Elle aura pourtant connu plusieurs séances d’humiliation devant la classe, et même une fessée par une de ses institutrices !

Arrivée au collège, a commencé le harcèlement scolaire. Ses résultats restaient corrects, toujours dans le but de ne pas se faire remarquer, mais elle souffrait. Les moqueries étaient quotidiennes. Une fois passée la porte de la maison, elle régressait. Elle avait profondément besoin qu’on la rassure et qu’on s’occupe d’elle. Avant le repas du soir, les maux de ventre commençaient à l’idée de retourner à l’école le lendemain.

La tendance s’inverse après deux ans. Elle perd toute motivation à travailler.

« J’arrête totalement de toucher à mes cahiers et trouve des excuses pour ne pas me faire punir. Ça devient vite un jeu et un défi. »

Arrivée au lycée, sa moyenne générale chute. Dans la peur de redoubler, elle laisse tomber et décroche. Ses parents sont démunis, n’ont rien vu venir, l’emmènent voir des médecins qui refusent de lui fournir des certificats médicaux pour qu’elle puisse s’inscrire aux cours par correspondance. Elle tombe enceinte, et reprendra les études à 17 ans en CAP.

 

Alors, pourquoi avoir fait le choix de l’IEF (Instruction En Famille) ? En quoi ta scolarité a-t-elle influencée ton choix ?

« J’en veux à mes parents de n’avoir pas su me proposer quelque chose au moment de mon décrochage. » 

C’est pour éviter à ses enfants de vivre tout ce qu’elle a vécu que Marie a fait le choix de les instruire à domicile. Elle reste encore aujourd’hui profondément marquée par toute la douleur ressentie durant ces longues années.

Si elle n’a pas eu le choix pour son ainée, faute d’accord du père pour l’IEF, son mari actuel la soutien dans son projet. Bien qu’il ait un parcours scolaire plus simple, plus classique, il ne garde tout de même pas un souvenir très positif de ces années et souhaite pour ses enfants plus de douceur et de gaieté.

« Nous essayons de garder en tête que toutes les écoles ne se valent pas, ni même les enseignants. » 

S’ils sont bien conscients que tout pourrait aussi bien se passer à l’école pour eux, ils ne souhaitent pas les scolariser tant qu’ils ne les sentent pas prêts à affronter certaines épreuves des établissements scolaires. Ils resteront donc à la maison au moins durant les premières années de maternelle, afin de pouvoir répondre au mieux à leur besoin d’amour et d’épanouissement plus que de salles de classe. Pour la suite, ils ne sont pas fermés. Ils s’adapteront aux demandes et aux besoins de leurs enfants afin de voir ce qui leur correspondrait. Marie reste, dans tous les cas, préparée à réagir et accompagner ses trois enfants en cas de difficultés afin de leur offrir l’accompagnement qu’elle aurait souhaité avoir lorsqu’elle souffrait.

 

Depuis quand connais-tu l’IEF ? Quelle image en avais-tu ?

Marie a toujours connu, ou presque, l’IEF. Ils avaient dans leur entourage une personne dont les frères et sœurs ont été en unschooling. Ses parents connaissaient donc le principe mais elle a grandit en entendant qu’ils étaient l’exemple à ne surtout pas suivre car aucun des trois enfants n’avaient de diplôme. Pour autant, la jeune fille n’y voyait que du positif. Aujourd’hui, devenus adultes ils s’épanouissent dans leur domaine, reprennent des études pour ceux qui l’ont souhaité.

« Moi, par contre, à travers mes yeux d’enfants, ça me faisait rêver. J’avais sous les yeux une autre solution possible. » 

 

Aujourd’hui, quelle méthode as-tu choisi pour tes enfants ? Avez-vous une routine ? Suivez-vous une pédagogie en particulier ?

La maman m’explique qu’elle reste assez formelle mais en utilisant plutôt la méthode Montessori. Ils expérimentent beaucoup, font des expériences. Par exemple, pour lui expliquer la digestion et le fonctionnement des sucs gastriques, elle a illustré ses propos grâce à du pain de mie et deux verres. Le premier pain plongé dans de l’eau, le second dans un verre de soda et jus de citron. Lorsqu’il montre un nouvel acquis (par exemple, compter et dénombrer jusqu’à 10), elle lui fait faire un exercice écrit afin qu’il le colle dans son cahier de travaux pour montrer aux inspecteurs.

Elle admet avoir peur des contrôles, c’est pour cette raison qu’elle impose un petit rythme à son fils à raison de quelques minutes par jour.

« Quand je vois qu’il est réceptif, j’en profite. Si je vois que ça l’embête, j’écourte. » 

Ils font donc environ une demie-heure de formel, parfois moins, tous les jours, sauf le week-end. Il apprend bien entendu également dans la vie quotidienne grâce à un environnement stimulant qui répond à sa curiosité naturelle. Marie prévoit de continuer de cette manière jusqu’au CP. Ensuite, elle lui proposera d’intégrer l’école, en lui présentant cela comme une nouvelle méthode à tester. S’il aime, il y restera. Dans le cas contraire, il restera à la maison mais sa maman pense se tourner vers des cours par correspondance.

 

Quels sont, pour toi, les points positifs et les points négatifs de l’IEF ?

« On partage les savoirs et les découvertes, on vit plein de choses ensemble. C’est plus profond que lorsque l’on va les chercher à 16h et que la journée est déjà presque terminée… »

Pour Marie, l’IEF permet de renforcer sa relation avec son enfant. Permet également au parent de réapprendre beaucoup de notions, abordées de différentes manières. En dernier point, elle met en évidence, le rythme de l’enfant. L’IEF étant, pour elle, le meilleur moyen de respecter son rythme en étant certains qu’ils puissent s’y épanouir.

Concernant les points négatifs, le premier dont elle me parle est le coût. Dans un premier temps, elle explique que souvent un des parents cesse de travailler pour s’occuper des enfants et de leur instruction (ndlr : ce qui n’est pas obligatoire, n’hésitez pas à consulter notre dossier sur le sujet) . Dans un second temps, Marie parle de l’investissement financier que représente l’IEF afin d’avoir du matériel à disposition pour chaque expérience et exercice. Marie met en avant un dernier point : « Cela demande beaucoup de temps et d’organisation ». Prévoir en avance permet de disposer du matériel qu’il faut, prévoir un plan B au cas où l’enfant n’accroche pas, entre autres… Il faut anticiper.

 

Si tu avais des conseils à donner à des parents qui se lancent dans l’IEF, ce serait quoi ?

Marie conseille, avant de démarrer, de se renseigner sur les différentes méthodes et pédagogies qui existent. Essayer, afin de voir laquelle correspond le mieux à votre enfant. Parfois, on se met beaucoup de pression, surtout lorsque quelque chose ne fonctionne pas, on pense que le problème vient de nous, alors qu’il suffit de revoir son approche et sa méthode afin de l’adapter au mieux à l’enfant.

Son second conseil est de lâcher prise, ne pas se focaliser que sur l’IEF.

« On reste des parents donc, de temps à autre, aller manger une glace, jouer aux playmobils, faire des guilis… Se recentrer sur le plus important : la famille. »

Elle termine :

« Les apprentissages, c’est bien bien, mais il ne faut pas que cela devienne une obsession ou une compétition. » 

 

Si tu devais définir l’IEF en un mot, lequel choisirais-tu ?

« Aventure »

 

Merci infiniment Marie pour ta douceur et ta confiance.

 

 

Chloé, de La Famille Gwaï, pour Pass éducation