« Pour une refondation de l’école guidée par les enfants » Céline Alvarez , at TEDxIsère River, 06/04/2014.
L’objectif de cette conférence pour Céline Alvarez, est de nous faire prendre conscience de l’importance et de l’urgence de « reconstruire l’école sur un système, un environnement qui crée des conditions d’épanouissement pour l’enfant et dans lequel l’adulte peut répondre aux besoins spécifiques de chaque enfant, de façon individuelle ». Céline Alvarez, qui possède une formation en linguistique, décide en 2009 d’intégrer l’éducation nationale avec cette volonté de faire bouger les choses de l’intérieur, de révolutionner notre système éducatif français. Elle passe donc et réussit le concours de professeur des écoles. En 2011, le Ministère de l’éducation nationale l’autorise à mener une expérimentation pionnière au sein d’une école maternelle située en Zone d’Education Prioritaire à Gennevilliers. Une classe qui sera axée sur la pédagogie Montessori, mais que Céline Alvarez enrichit et adapte à la lumière des sciences cognitives et de la linguistique. L’objectif de cette expérimentation étant de proposer un nouvel environnement pour l’école maternelle, qui soit scientifiquement fondé et validé et qui permette de solliciter de façon optimale les 4 mécanismes d’apprentissages et d’épanouissement de l’être humain.
Céline Alvarez nous énonce au début de sa conférence des chiffres venant du Rapport 2012 du Haut Conseil de l’Education : 25 % des élèves de CM2 sortent avec des acquis fragiles et insuffisants en lecture, mathématiques et écriture…et s’y ajoutent 15 % qui en sortiront chaque année sans les acquis de base en lecture, mathématiques et écriture. Soit 40 % , c’est à dire environ 300 000 élèves qui sortent du CM2 avec de graves lacunes qui les empêcheront de suivre une scolarité normale au collège. Pourtant les sciences cognitives nous donnent toutes les informations nécessaires pour comprendre la façon dont apprend l’être humain. En effet pour apprendre, 4 paramètres sont indispensables:
- l’attention : il faut être attentif.
- L’engagement : il faut avoir la motivation .
- Un retour d’information immédiat : il faut que l’enfant sache de suite s’il s’est trompé.
- La consolidation : il faut répéter pour permettre au savoir de s’automatiser.
De plus, nous savons également que les inégalités sont déterminantes et arrivent entre 0 et 6 ans : ainsi, la place de l’école maternelle est centrale dans la prévention de l’échec scolaire. Et pourtant, celle-ci sollicite très peu ces 4 paramètres d’apprentissages : en effet, nous pouvons constater que sur une matinée de 3 heures en maternelle, seulement 30 à 45 minutes sont des moments dédiés à un apprentissage direct guidé par l’enseignant . De plus cette activité n’est pas choisie par l’enfant lui-même mais par l’enseignant , donc il n’y aura aucune motivation personnelle de l’enfant. Ainsi en découle cette conséquence : peu d’attention, peu d’engagement et le signal d’erreurs que reçoit l’enfant sera extrêmement pauvre car l’enseignant – avec 30 enfants dans sa classe – ne peut donner un signal d’informations immédiat . Et comme la tâche est imposée à l’enfant, celui-ci n’aura qu’une seule et unique envie : s’en libérer pour aller dans les coins jeux de la classe ( imitation, construction,…). Il n’y aura alors ni répétitions ni consolidation.
C’est de ce constat qu’est né le projet de cette classe d’ expérimentation : il est plus qu’urgent que l’école maternelle se réorganise de l’intérieur, selon ces 4 principes. Ce qui pour Céline Alvarez serait déjà une vraie révolution car si ces mécanismes de base étaient respectés, les enfants s’épanouiraient certes au niveau scolaire…mais ce sont également d’autres compétences telles que la confiance en soi , l’estime de soi , la capacité d’entraide, de coopération qui se développeraient.
Voici donc les grands principes de cette classe d’expérimentation en maternelle :
- Les enfants sont autonomes, ils choisissent leur travail…d’où une profonde motivation de leur part.
- Chaque activité proposée réunit les 4 paramètres d’apprentissages.
- Tout le matériel est sensoriel, car il est scientifiquement prouvé que les enfants apprennent en touchant, en manipulant. Les enfants sont ainsi attentifs et engagés, et le matériel permet un retour d’informations immédiat,il leur montre leurs erreurs. Cela fixe ainsi une difficulté intéressante pour l’enfant qui va répéter l’activité, essayant de se perfectionner.
- Les interactions sociales sont extrêmement importantes dans l’apprentissage : ainsi les 3 niveaux d’âge étaient mélangés dans la classe ( Petite Section , Moyenne Section , Grande Section). C’est alors un enseignement horizontal qui se met en place , et non plus vertical dans lequel l’enseignant transmet la leçon aux élèves qui ne font qu’écouter : le savoir se partage dès lors entre les enfants, des plus grands aux plus petits certes mais également des plus petits aux plus grands. Et la conséquence directe de ce mélange des niveaux d’âge est l’absence de compétition et de comparaison dans la classe, au profit d’une émulation constante qui enrichit la vie de la classe.
L’expérience de cette classe expérimentale a duré 2 années et Céline Alvarez nous explique qu’au début de la première année, c’est-à -dire au mois de septembre, les enfants ont été évalués et ceux-ci étaient – dans beaucoup de dimensions – très en -dessous du niveau moyen. A la fin de cette première année, en juin, ces mêmes enfants ont été retesté et il en est ressorti qu’ils avaient non seulement rattrapé la norme pour la plus grande majorité… mais également dépassé de plusieurs mois, voire plusieurs années pour certains. 100% des élèves de Grande Section étaient entrés facilement et avec plaisir dans la lecture, ainsi que 90% des élèves de Moyenne Section. Des résultats rendus possibles par la rencontre entre les travaux de Maria Montessori, la linguistique française et les neurosciences cognitives, affectives et sociales. Ainsi, de cette stimulation intellectuelle née grâce à la réunion des 4 paramètres d’apprentissages, en découlent des enfants calmes, épanouis, apaisés, heureux de travailler. Forte de cette expérience, Céline Alvarez nous confirme qu’ il est vain de vouloir reconstruire une école sur des bases qui vont mal, mais qu’il faut au contraire la reconstruire « sur un système , un environnement qui crée des conditions d’épanouissement pour l’enfant et où l’adulte peut répondre aux besoins spécifiques de chaque enfant, de façon individuelle ».
« Il faut ouvrir le débat et penser une école pour nos enfants ».
Plum’elle, fondatrice de ptiboudeveil.com, pour Pass éducation