Comment limiter les conflits parents-enfants en IEF ?

Pratiquer l’instruction en famille, n’est-ce pas courir le risque de multiplier les conflits parents-enfants ? De fait, dans le cadre de l’école à la maison, le temps passé ensemble est beaucoup plus conséquent qu’avec une scolarisation ordinaire. Du coup, les occasions de friction peuvent être plus fréquentes. On s’imagine les fameuses disputes parents-enfants liées aux devoirs à la maison se répéter régulièrement tout au long de la journée. Pourtant, détrompez-vous !

Mettre en place l’instruction en famille implique de réfléchir à sa posture de parent, d’éducateur et d’envisager  cette question des conflits. Comprendre comment limiter et gérer les désaccords est une des bases des relations familiales sereines, apaisées et donc d’une atmosphère propice aux apprentissages. Voici quelques éléments pour alimenter votre réflexion sur le sujet. 

Quelles peuvent être les origines de conflits parents-enfants en IEF ?

Concentrons-nous sur ce que l’école à la maison introduit comme spécificités dans la relation parents-enfants classiques. 

La pression académique

Les parents peuvent redouter que le contrôle pédagogique auquel ils sont soumis (quelques exceptions quand on vadrouille à l’étranger) ne se passe mal si leurs enfants n’ont pas le niveau attenduLe risque est alors de ne plus respecter le rythme biologique de l’enfant et son mode d’apprentissage pour le faire « bachoter ». L’enfant peut se bloquer et exprimer son mal-être avec des émotions parfois explosives. 

Une double casquette parent-enseignant

Pour un enfant, qu’il soit en train de faire des exercices de mathématiques ou de prendre son repas en famille, son papa ou sa maman reste son parent. Et si ce dernier adopte une posture plus rigide, moins soutenante émotionnellement, quand il endosse son rôle d’instructeur, l’enfant peut ne pas comprendre. Il peut se sentir perdu, trouver la situation ambiguë. Il pourra alors avoir des réactions émotionnelles fortes de colère, de tristesse, d’angoisse. 

Est-il nécessaire de changer de posture lorsqu’on accompagne ses enfants sur le chemin de l’apprentissage ?

Un parent ne reste-t-il pas un éducateur, qu’il s’agisse de favoriser l’acquisition de compétences « scolaires », psychosociales, manuelles, etc. ?

Des méthodes d’apprentissage inadaptées

Si l’on répercute une pression académique sur l’enfant, si l’on adopte une posture ambiguë, quand on enseigne, est-on en mesure de remettre en cause les méthodes d’apprentissage choisies ?

Les parents peuvent préférer certaines approches pédagogiques, pas toujours en phase avec les besoins ou capacités de leurs enfants. Cela peut conduire l’enfant à perdre confiance en lui s’il ne parvient pas à apprendre, à manquer d’enthousiasme pour les apprentissages. 

Or, un des intérêts de l’IEF, c’est bien de pouvoir suivre et répondre aux intérêts de l’enfant dans la mesure du possible. C’est aussi pouvoir piocher dans les différentes approches pédagogiques pour offrir à l’enfant celle qui, en fonction de la discipline travaillée, sera la plus adaptée à ses besoins et modes d’apprentissage.

En quoi consistent les disputes parents-enfants en instruction en famille ?

On ne réfléchit pas forcément au parent que l’on veut être et à la relation que l’on souhaite tisser avec ses enfants. J’ai eu personnellement cette réflexion quand mes enfants étaient déjà adolescents. J’aurais aimé la mener avant. Et c’est notamment parce que nous avons été amenés à faire un peu d’école à la maison, que je me suis penchée sur le sujet. Car il faut bien imaginer qu’au quotidien, quand on instruit en famille, les occasions de disputes peuvent être fortement multipliées. À l’enfant qui ne veut pas ranger sa chambre, se laver les dents, s’habiller, etc. peut s’ajouter l’enfant qui ne veut pas travailler, ne pense qu’à s’amuser, réclame des dessins animés, des jeux vidéos… 

Opter pour l’école à la maison ne se réduit pas à appliquer un programme pour atteindre les compétences du socle commun. Il convient aussi de réfléchir au cadre.

Des disputes quotidiennes en lien avec l’organisation

L’organisation de la journée scolaire à la maison (horaires, routines) peut devenir un terrain de désaccord, surtout lorsque les enfants ressentent une rigidité excessive ou, au contraire, un manque de structure. Il s’agit de trouver un juste équilibre. Des divergences d’opinion peuvent aussi émerger sur les contenus et les méthodes d’enseignement. Des tensions quotidiennes peuvent ainsi s’accumuler et affecter l’ambiance familiale.

Des conflits émotionnels liés à une pression et une rigidité excessives

Les parents peuvent éprouver de l’anxiété à l’idée de ne pas être à la hauteur en tant qu’enseignants. Quant aux enfants, ils peuvent se sentir submergés par les attentes académiques… sans trouver le soutien espéré auprès de leurs parents, trop stressés pour accueillir les émotions de leur enfant. 

Les deux parties vivent alors une forte frustration, en raison d’une grande incompréhension, d’un manque de communication et donc d’écoute des ressentis de chacun. Les relations familiales peuvent se détériorer et la sérénité nécessaire aux apprentissages, s’évaporer.

3 conseils pour limiter les conflits parents-enfants en IEF ?

Ressentir une pression lorsqu’on choisit de faire l’école à la maison est plutôt normal. Va-t-on réussir à :

  • mener ses enfants au niveau des compétences attendues ;
  • gérer les différences individuelles si l’on a une fratrie à instruire ;
  • conserver la motivation, l’intérêt, l’enthousiasme de chacun ;
  • maintenir une atmosphère familiale sereine ;
  • à développer une bonne socialisation pour ses enfants ;
  • faire face au jugement et critiques externes ;
  • équilibrer les multiples responsabilités que cela implique.

C’est pourquoi il est important d’être au clair sur la posture à adopter pour développer une relation de qualité avec ses enfants

1 – Mettre en place une communication ouverte et respectueuse

Communiquer avec quelqu’un ne se réduit pas à parler avec lui. Malheureusement, on n’apprend peu ce qu’est la communication, ses piliers et ses saboteurs. 

Pour communiquer de façon respectueuse avec son enfant, identifions les saboteurs de la relation :

  • les injonctions ;
  • les jugements ;
  • les menaces et le chantage ;
  • la culpabilisation.

Instaurer une communication ouverte, c’est être en capacité d’écouter ce que l’autre a à dire. Cela signifie que l’on est présent dans la relation, qu’on reçoit ses mots, mais aussi tous les autres signes non verbaux. On écoute sans jugement, avec bienveillance et tolérance… et hauteur d’enfant, comme l’explique Marion Cuerq, qui décrypte l’éducation des enfants en Suède.

Communiquer avec son enfant, c’est pouvoir nourrir son besoin relationnel, c’est accueillir ses émotions, qu’elles soient agréables ou désagréables et l’accompagner dans ses tempêtes émotionnelles

Cela nécessite de bien se connaître soi-même, d’analyser ses propres émotions, pour pouvoir faire preuve de patience, d’ouverture, d’écoute… et différer ce que l’on a à lui dire si on est en colère.

2 – Organiser des routines claires et flexibles dans un cadre éducatif donné

Si réussir à se débarrasser des injonctions est une bonne chose, cela ne signifie pas pour autant que les règles doivent être absentes. Bien au contraire, l’enfant a besoin d’un cadre éducatif. Les règles sont clairement énoncées, et donc connues de tous. Elles évoluent en fonction de l’âge des enfants et peuvent se discuter en conseil de famille. Spécifiques à chaque foyer, elles définissent le cadre dans lequel évoluent ses membres. Elles aident l’enfant à se repérer et à se structurer. L’établissement de routines claires, mais flexibles aide à tenir le cadre. L’IEF permet de respecter le rythme de l’enfant, en favorisant un réveil naturel, suivi d’une petite routine du matin. Puis, un emploi du temps fixé sur la semaine peut aider l’enfant à se repérer entre apprentissages plus formels et sorties pédagogiques, temps libres, activités extérieures. Planifiez des horaires réguliers pour les activités académiques, les pauses et les loisirs. Mais ajustez-les en fonction des besoins et des circonstances.

3 – Observer et adapter

En IEF, on peut prendre le temps d’observer ses enfants, d’identifier leurs envies, leurs besoins à l’instant T. On peut ainsi adapter les apprentissages et les approches pédagogiques pour suivre leur enthousiasme. Et si vous répondez à leurs besoins, vous limiterez de fait les conflits et développerez des relations harmonieuses. 

Ces 3 conseils, qui s’appliquent finalement au-delà de l’école à la maison, ne feront pas disparaître les disputes parents-enfants comme par magie. Ce n’est d’ailleurs pas forcément souhaitable. Gérer et résoudre des désaccords font partie des apprentissages. L’important, c’est que cela puisse se faire de façon sereine, de sorte que chacun écoute l’autre et puisse être entendu.

 

Elsa Boulet, du blog Mes Petits Curieux pour Pass-Education