L’intérêt de faire un journal de la Nature

“The sense of beauty comes from early contact with nature.”

Charlotte Mason

 

Tenir un journal de la Nature, c’est tout simplement faire le relevé de ce que vous faites et découvrez lors de vos sorties nature. Il peut être tenu par vous, par vos enfants, ou, mieux, par tout le monde ! Il n’y a pas vraiment de règle en la matière, même si vous pourrez trouver nombre de conseils en tous genres, sur des sites tels que Pinterest, ou des blogs suivant la pédagogie Charlotte Mason – même si on peut tout à fait tenir un journal de la Nature sans suivre la pédagogie Mason, comme c’est notre cas par exemple.

Vous pouvez vous laisser guider par des pages toutes faites et qu’il reste à remplir, ou au contraire opter pour des pages blanches et laisser libre cours à votre imagination et vos envies ; vous pouvez choisir une méthode classique et simplement tenir un herbier, ou bien vous pouvez opter pour une solution type scrapbooking. L’essentiel, est que votre Journal vous ressemble, et vous plaise ! Utilisez du matériel que vous aimez, à la fois voir et utiliser ; ça peut être des crayons de papier, de l’aquarelle, des pastels, … Choisissez votre journal de la même façon, plus vous l’aimerez vide, plus vous prendrez plaisir à le remplir. Il peut être en papier recyclé, en papier kraft (cela donne de très jolis rendus avec des fleurs ou feuilles séchées par exemple, mais aussi avec des dessins au crayon ou aux pastels). Choisissez le fonctionnel et pas trop grand, pour pouvoir l’emmener avec vous lors de vos sorties, et y ajoutez des éléments sur le vif, en toute spontanéité, et quand les émotions s’expriment plus fort que dans les souvenirs.

Vous pouvez aussi varier les supports choisis, cela donnera plus de vie et de texture à votre journal, et c’est aussi très utile pour éviter la lassitude chez les enfants.

Ce journal fonctionnera aussi comme un journal de la famille, et sera un formidable outil de souvenir pour vos enfants, lorsqu’ils auront atteint l’âge adulte.

Relevez-y vos observations et vos émotions en Nature, ce que vous voyez, entendez, touchez, sentez. Faites-en un véritable enregistrement de vos expériences sensorielles.

Laissez vos émotions s’exprimer, libérez votre créativité sans retenue et sans gêne.

C’est une bonne solution pour amener les petits réticents à l’écriture, la lecture, l’observation, la réflexion, pour développer leur vocabulaire, leurs capacités à s’exprimer et faire des phrases.

Cela permet de passer du temps avec vos enfants dans la Nature, de fuir l’enfermement, les écrans, et de recréer/renforcer les liens, à la fois entre vous, et avec la Nature. Avec le journal, vous avez tous ces bénéfices, mais aussi les qualités engagées par l’observation, ainsi que les découvertes et apprentissages qui en découlent.

Lors des sorties nature, vous pouvez guider l’enfant en proposant des activités, comme une chasse aux trésors thématique par exemple (sensorielle, ou saisonnière), ou, mieux, le laisser aller librement, et ainsi relever ses propres observations, selon ses passions et centres d’intérêt.

Charlotte Mason recommandait vivement que ces sorties nature se fassent à un rythme quotidien, au moins entre avril et octobre, et sur plusieurs heures (6 ou 7 selon elle), afin que l’enfant profite pleinement du grand air, et s’y développe et épanouisse au mieux, loin de l’enfermement de murs. Un tel rythme peut faire peur, et en décourager plus d’un, à une époque où les activités extra scolaires sont foison, et où les familles en général, manquent déjà cruellement de temps libre. Cependant, il est essentiel de prendre le temps. Prenez le temps d’emmener vos enfants dans la Nature, il est de la responsabilité de chaque parent de permettre aux intérêts innés des plus jeunes pour la Nature de trouver un terrain où s’épanouir, et s’exprimer. Nombre de familles en IEF et qui suivent la pédagogie Mason, ne consacrent qu’une journée, ou même une demi-journée, aux sorties Nature. Ce n’est peut-être pas suffisant pour les besoins de l’enfant, là est un sujet pour un autre article, mais quoi qu’il en soit, c’est suffisant pour tenir un journal de la Nature !

Le mauvais temps ne doit pas vous amener à annuler une sortie Nature, surtout si elles sont déjà limitées en nombre dans votre famille. Le mauvais temps, d’ailleurs, est une notion toute subjective, surtout de nos jours où la sécheresse est si fréquente !  Pour moi, le mauvais temps, c’est grand soleil, chaud et sec les jours de pluie sont, par la force des choses, devenus une bénédiction. Selon Mason, pas de mauvais temps, il suffit d’adapter les tenues vestimentaires en fonction. C’est devenu très simple à faire de nos jours, où une foule de vêtements thermo résistants et imperméables nous sont proposés. Il y a environ 30 000 ans, des hommes vivaient à plus de 4000m d’altitude, au Tibet. Des milliers d’outils en pierre ont été retrouvées aussi haut, dans des grottes. Eux, n’avaient pas tous les équipements dont on dispose aujourd’hui, et pourtant, ils vivaient là-haut. Comparativement, une sortie de quelques heures sous la pluie, avec la promesse de rentrer au chaud après, franchement… Et puis bien souvent, les enfants adorent courir sous la pluie, s’éclabousser, sauter dans les flaques, etc. D’autre part, le changement de temps apportera une fabuleuse variété aux observations à faire.

Les observations faites sur le terrain, vécues par l’enfant, sont bien plus efficaces que n’importe quelle autre forme d’apprentissage. Il a été scientifiquement prouvé que les apprentissages menés sans contrainte, en suivant les intérêts de l’enfant, et associés à des émotions positives (émerveillement de la découverte, fascination pour l’inconnu) sont bien mieux assimilés que ce qui est appris « de force » et impliquant des émotions négatives. Par ailleurs, manipuler, toucher, sentir, toutes ces sensations physiques, favorisent aussi la mémorisation. Bien sûr, il ne s’agit pas du tout de dénigrer la lecture, ou de dire que l’on n’apprend rien en lisant. Lire est essentiel à bien des égards, et tient d’ailleurs aussi une place essentielle dans la pédagogie Mason. Cependant, il faut bien reconnaître qu’un enfant peut avoir lu 20 livres sur le cycle de vie des grenouilles, s’il trouve lui-même des œufs, suit leur évolution très régulièrement, voit ensuite lorsque les têtards seront nés, puis suit leur croissance, il s’en souviendra bien mieux, et toute sa vie. Et, il s’en souviendra encore mieux s’il a lui-même consigné tout çà dans son journal, avec ses propres mots et ses propres dessins, même si ça paraît maladroit aux adultes, et ne peut faire l’objet d’une photo parfaite sur Instagram.

Alors, n’hésitez pas à vous lancer !

 

 

Anne-Catherine Proutière, fondatrice du blog « Pédagogies alternatives en liberté », pour Pass éducation