Aux portes de l’effondrement d’un système qui ne peut plus tenir debout (croissance, surconsommation, destruction de la planète), de plus en plus de personnes décident de créer des éco-villages, certains les appellent aussi villages de transition afin de renouer avec le respect de la nature et de revenir à une vie plus simple, moins consumériste et pleine d’humanité. Aujourd’hui, il semblerait que l’éducation et l’instruction des enfants en France commencent à préoccuper une partie de la population française tout autant que la protection de l’environnement, observatrice et admiratrice de ce qui se pratique dans les pays d’Europe du Nord. La loi interdit aux familles qui ont déclaré leurs enfants instruits en famille de se réunir pour instruire leurs enfants ensemble. Existe-t-il une solution qui permettrait de rester en accord avec la loi -qui, à l’origine, est faite pour éviter le communautarisme sectaire et pseudo-religieux-, tout en répondant à nos besoins ?
Revenons à l’idée de création d’un éco-village. Un terrain de plusieurs hectares, des habitations écologiques, des cultures naturelles avec l’objectif d’atteindre l’autonomie alimentaire, des installations communes qui permettent l’autonomie énergétique du village… et pour l’instruction ? Que pourrait bien proposer cet éco-village ? Nous savons qu’aujourd’hui, la loi permet encore de créer (et donc de déclarer l’ouverture auprès de l’académie de sa région) des écoles, elles sont privées et hors contrat avec l’Education Nationale, toutefois inspectées une fois par an par un des inspecteurs académiques dont dépend géographiquement l’école. Celles que nous connaissons (il en existe plusieurs milliers en France), ne sont financièrement pas à la portée de tous puisque ce type d’écoles ne reçoit aucune aide de l’Etat. Qui dit école, dit instruction à l’école et pas à la maison. Nous ne sommes donc plus dans la définition de l’école à la maison, l’instruction en famille, quoique… L’idée de créer une école de façon légale qui ne ressemblerait pas à une école traditionnelle est peut-être une piste à explorer.
Imaginons que dans cet éco-village, les parents insatisfaits de l’école classique d’aujourd’hui, décident de créer et de gérer eux-mêmes un lieu qui permettrait à leurs enfants de se réunir pour apprendre. Un lieu où la liberté pédagogique serait totale. Un lieu où tous les parents se partageraient, à tour de rôle, le « poste » d’accompagnateur pédagogique auprès des enfants, de leurs enfants et ceux des autres. Ce serait donc les parents qui décideraient ensemble la façon d’instruire les enfants dans un lieu commun. Les enfants seraient administrativement inscrits sur les listes d’élèves de l’académie comme pour les enfants inscrits dans les écoles hors contrat et non pas inscrit comme enfants instruit en famille, ils auraient le statut d’enfants scolarisés. Mais le seraient-ils pour autant ? Que ces enfants soient instruits à la façon « unschooling » ou de manière plus formelle avec des cahiers à remplir ou de manière ordonnée mais tout aussi libre que le « unschooling », à l’image de la pédagogie Montessori par exemple, pouvons-nous nous autoriser à penser que malgré un lieu commun, une inscription sur une liste officielle de l’académie, les enfants sont encore instruits en famille ?
Est-ce que l’Etat y verrait d’un bon œil ce type de structures qui plus est gratuites puisque gérées par les parents à tour de rôle (le matériel étant financé grâce aux actions au travers l’organisation de conférences, de projections de documentaires, de formation à l’agro-écologie, de formation sur la parentalité positive etc… mises en œuvre au sein de l’éco-village). Ferait-il en sorte de durcir à nouveau la loi qui autorise la création d’écoles privées hors contrat ? Qui, par conséquent, obligerait les familles de continuer à déclarer leurs enfants comme étant instruits en famille et par la même occasion de les empêcher de se réunir ? L’école, au centre du village, était, il y a encore 40 ans une réalité. Aujourd’hui, pour subsister les écoles sont obligées de se regrouper, ne respectent pas le rythme biologique de l’enfant à cause des transports plus longs et bien d’autres inconvénients.
Pourquoi l’école ne reprendrait-elle pas sa place d’origine ? Pas l’école qu’on connaît aujourd’hui. Un autre type d’école, une école alternative, parfaitement inclusive avec des valeurs profondément humanistes. Placée au centre du village, elle réduirait le temps de transport, voir même, sa proximité permettrait de s’y rendre à pied, elle serait donc davantage respectueuse du rythme de l’enfant en fonction des saisons, du temps d’ensoleillement, elle donnerait vie au village ! Si cette école, ce lieu de rassemblement était un lieu qui permettait à l’enfant d’apprendre à son rythme, sans compétition, dans le respect de la nature et des autres ? Un lieu où tout serait à disposition de l’enfant pour alimenter et répondre à sa soif naturelle d’apprendre ? Un lieu où les jeux d’extérieur auraient autant d’importance que les apprentissages scolaires ? Un lieu où la créativité serait encouragée, où l’enfant pourrait passer du temps à imaginer, créer, fabriquer ? Un lieu où les âges, les tailles, les fonctionnements cognitifs, les handicaps ne formerait qu’un seul lieu d’apprentissage, d’épanouissement personnel ? Est-ce que ce lieu se nommerait-il encore « école » ? Maria Montessori appelait ce lieu « la casa dei Bambini », la maison des enfants. Si les enfants étaient regroupés dans une « maison des enfants » gérée par leurs propres parents, seraient-ils appelés « écoliers » ou « enfants instruits en famille » ?
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Delphine Bessière, pour Pass éducation