Interview de Aline, en Unschooling depuis 3 ans pour son fils Tom, 6 ans et demi.
Tom fréquente l’école durant 6 mois, de l’âge de 3 ans à l’âge de 3 ans et demi.
Pourquoi est-il déscolarisé ?
Tom a 1 an quand Aline commence à se questionner : ” N’y a t’il que le schéma de l’école pour apprendre ? “. Elle se renseigne sur l’IEF… Puis Tom a 3 ans et va à l’école. Il y passe la demie journée, pleure un peu au moment de la séparation, mais apprécie de jouer avec ses copains et copines. Cette première phase de découverte plutôt positive dure quelques semaines, puis Tom demande à rester la journée complète à l’école pour jouer plus longtemps avec ses amis. Il se rend compte alors que le temps de sieste dans le noir, en silence, ne lui convient pas du tout. Il ne parvient pas à dormir et ne peut récupérer. Aline observe un changement de comportement chez son fils, en 3 ou 4 semaines. Il devient violent envers ses parents et n’a plus de plaisir à aller à l’école. Il apprend à se battre pour se défendre, puis finit par s’isoler car il ne comprend pas cette ambiance d’agressivité. Il subit des violences verbales et physiques de la part d’autres enfants au moment des récréations. Il cherche alors du soutien auprès de sa maîtresse, mais celle-ci ne se montre pas disponible, elle se repose pendant les récréations. Tom perd confiance en elle, car dans le besoin, elle n’est pas là. Le soir à la maison, Tom se relâche enfin et fait de grosses crises de décharge. Il a moins d’appétit, son sommeil est moins bon et il fait de nouveau pipi au lit. Il commence à stresser alors qu’il était d’un tempérament tranquille. Il se crispe sur son crayon car sa maîtresse lui interdit de dépasser la ligne… Il rentre dans un mode compétitif. Son état se dégrade donc sur plusieurs plans, l’école est pour lui un lieu destructeur émotionnellement et physiquement. Mais pour la maîtresse,
tout se passe bien… Aline demande à voir le directeur. Son point de vue : « La cour de récré c’est comme la vie, il faut apprendre à se défendre, se blinder… » Au moment des vacances scolaires, Tom redevient lui-même. Aline apprend que d’autres enfants sont punis, vont au coin et n’ont pas le droit d’aller aux toilettes. [3 ans plus tard, elle apprendra que Tom a lui-même été puni car il bougeait en regardant les autres en cours de gym…] Elle ne supporte pas que son fils vive dans cette ambiance. Après les vacances de février, Tom ne va à l’école que les matinées. Puis un jour il se plaint de douleur au ventre dans la voiture en allant à l’école, et il vomit. C’est l’élément déclencheur. Après s’être assurée qu’il existait un réseau de familles IEF (
Instruction
En
Famille), Aline décide de déscolariser son fils début avril 2016. Elle est traitée de
mère irresponsable…
Comment se déroule l’instruction ?
La famille se trouve dans la Sarthe, à côté du Mans. Aline et Tom font de nouvelles rencontres, des sorties pédagogiques, fréquentent les musées, les cours de cirque. Tom se fait des copains. Au bout de 2 ans, ils déménagent dans le sud de la France, à côté de Montpellier. La région compte des familles IEF, mais Aline constate un manque de contacts entre elles. Elle crée donc un réseau IEF, organise plusieurs rencontres et sorties par semaine : médiathèque, parc, ludothèque. Les enfants jouent ensemble, apprennent à se connaître, créent des affinités…
En déscolarisant Tom, Aline imagine un cadre scolaire à la maison. Elle joue un peu à la maîtresse, mais cela ne convient pas à Tom. Le formel ne passe pas ! Elle s’oriente alors vers les apprentissages autonomes qui correspondent beaucoup mieux à la personnalité de Tom. Il apprend vite, Aline n’est pas inquiète. L’école et les groupes de copains ne manquent pas à Tom. Il a une hypersensibilité au niveau de l’ouïe qui rend ces ambiances désagréables, voire agressives car il ne peut pas gérer toutes les informations sonores. Il apprécie de voir ses copains en petit groupe, se sent à l’aise avec des enfants un peu plus âgés, mais d’une manière générale, il a la capacité de s’adapter à l’âge de ses amis. Il adore également passer du temps seul chez lui. L’IEF crée une ouverture vers l’autre. Le cloisonnement adulte/enfant n’existe pas, ils se traitent d’égal à égal, profitant des richesses du brassage intergénérationnel.
Comment se passe le contrôle pédagogique ?
Il a lieu au mois de janvier. L’inspecteur se montre patient et passionné ! Il soupçonne un profil
haut potentiel chez Tom, confirme l’incompatibilité avec l’école traditionnelle, et conseille à sa maman de lui faire passer des tests. Aline est confortée dans ce qu’elle perçoit depuis de nombreuses années, avant même l’école. Elle investit dans du matériel Montessori, s’intéresse aux pédagogies Steiner et Freinet. Elle utilise les supports de la vie quotidienne et essaie d’observer son enfant pour avancer à son rythme. Tom s’intéresse à tout. Aline a besoin de comparer pour le situer dans ses acquisitions du socle commun. L’inspecteur lui propose d’installer un rythme sur la semaine, avec des matières à étudier. Aline l’envisage éventuellement pour plus tard, rien n’est fermé. Mais actuellement tout est OK avec les apprentissages autonomes.
Voyez-vous des aspects négatifs ou plus difficiles à gérer ?
Pour Tom, l’IEF ne revêt aucun aspect négatif. Aline aimerait un peu plus de rencontres entre familles IEF. Par ailleurs, concilier son activité professionnelle et l’IEF, demande de l’organisation. Son travail de Doula réclame beaucoup de disponibilité. Le réseau IEF s’avère d’une grande aide pour s’occuper ponctuellement de Tom, d’autant plus que son papa est actuellement très pris par son activité professionnelle. Il travaille dans l’événementiel dans les Alpes de haute Provence, et ne revient à la maison qu’une ou 2 fois par mois. Cependant, les contraintes sont très peu nombreuses. L’IEF constitue pour Aline une philosophie de vie. Elle se crée la liberté de ne pas avoir de pression, notamment en soirée : pas de devoirs pour son fils, pas d’horaires à respecter pour le repas, le sommeil, le lever… Elle vit très bien son choix, même s’il lui demande beaucoup d’énergie. Elle peut compter sur son réseau qu’elle sollicite beaucoup. Elle invite aussi régulièrement les amis de son fils à la maison.
Avez-vous des conseils à donner à des familles désirant se lancer dans l’aventure de l’IEF ?
Aline soulève aussi des questions à se poser avant de se lancer :
- En discuter en famille. Est-ce que tout le monde est d’accord avec ce choix ?
- Qui peut / veut se rendre disponible pour l’IEF ? Si les 2 parents ont un travail prenant, un changement de métier est-il envisageable ?
- Repérer les réseaux locaux et associations pour rencontrer des familles ayant fait ce choix.
- On peut apprendre sans école, ni cours par correspondance. Qu’est-ce que les parents sont capables d’accepter et de mettre en place pour ce mode de vie ?
- En fonction des difficultés ou facilités des enfants et des parents, il y aura peut-être besoin d’accompagnement, d’intervenants extérieurs pour apprendre différemment, les parents n’ayant pas forcément les outils adaptés.
- Un bon niveau scolaire n’est pas obligatoirement requis pour accompagner ses enfants en IEF. Il s’agit plutôt d’être curieux, intéressé, faire des recherches, accompagner ses enfants dans leurs passions.
Quelques mots pour évoquer votre IEF ?
« Respect du rythme, liberté et ancrage (ne pas être déstabilisé) »
Aline nous partage :
Je remercie de tout cœur Aline pour le temps qu’elle m’a accordé, ainsi que ses riches partages qui pourront éclairer les familles dans leurs choix.
Florence P, pour Pass éducation