L’accueil de l’enfant pour sa première scolarisation : sécuriser pour permettre les apprentissages
La loi du 26 juillet 2019 abaisse l’âge de l’instruction obligatoire à 3 ans, réaffirmant l’importance pédagogique de l’école maternelle dans le système éducatif français. En prenant garde à ne pas la primariser, les programmes mettent en avant les spécificités de la maternelle et soulignent les enjeux de la première scolarisation de l’enfant. La petite section, premier maillon du parcours scolaire, représente la rencontre entre l’enfant et l’école. Il est donc primordial que l’accueil de l’enfant en maternelle se passe au mieux pour optimiser les chances de réussite de chaque élève. Comment l’enseignant, au centre de ce dispositif, se fait le garant de la sécurité affective nécessaire à l’entrée dans les apprentissages pour le groupe et pour chacun à l’intérieur du groupe classe ?
Garantir la sécurité affective pour permettre l’entrée dans les apprentissages
D’après le neuropsychiatre Boris Cyrulnik, à 3 ans, 2 enfants sur 3 sont sécures et ainsi prêts à entrer dans les apprentissages. En effet, c’est parce qu’ils sont affectivement sécurisés qu’ils vont pouvoir se détacher, se décentrer, s’intéresser au monde de l’autre, à ce qui les entoure et donc apprendre. La loi de refondation de l’école et les programmes de 2015 placent la bienveillance et le bien-être à l’école au cœur de la pédagogie. C’est un point essentiel en effet car le petit enfant arrivant à l’école vit une remise en question importante. Pour certains, c’est la première fois qu’ils quittent le cocon familial. La rencontre avec l’école et son premier représentant, vous, doit être réussie. Un enseignant rigide inhibe le comportement de l’enfant qui n’est plus en mesure d’apprendre, tout occupé qu’il est à tenter de se rassurer. À l’inverse, un enseignant bienveillant et souple rassure l’enfant qui peut ainsi trouver des repères stables, dans la classe et le groupe, et entrer dans les apprentissages. Cet enfant rassuré ose, prend le risque de se tromper, tâtonne et progresse. C’est en parlant avec lui, en jouant avec lui et en apprenant à le connaître que vous créez le lien affectif nécessaire à la mise en apprentissage de l’enfant.
En arrivant à l’école, le petit enfant n’est pas vierge de tout. Même s’il n’a jamais mis les pieds à l’école et n’en connaît pas les codes, il en a une image mentale. Tous les enfants qui passent la porte de votre classe le premier jour ont une image de l’école, des réticences ou des attentes. Il est important d’accueillir ces représentations, de les mettre en mots, d’expliciter l’école et le fonctionnement de la classe pour que tout le monde parte sereinement dans la même direction. Une fois qu’elle est devenue sécurisante, l’école maternelle peut accomplir sa mission : développer l’estime de soi et des autres, concourir à l’épanouissement affectif, favoriser l’éveil de la personnalité de l’enfant, stimuler son développement et devenir ainsi la première étape du parcours des élèves.
Faire de la classe un cadre sécurisant pour l’accueil de l’enfant en maternelle
Des repères spatio-temporels
L’aménagement matériel de la classe est pensé pour stimuler et rassurer l’enfant de manière à lui permettre de jouer avec les autres, d’interagir avec eux, mais également de s’isoler s’il le souhaite. En petite section, c’est par une organisation ritualisée alternant les modalités d’activité, que vous posez les jalons d’un repérage rassurant dans le temps. La construction d’outils facilite ce repérage dans aujourd’hui puis la semaine et le mois. Une frise de la journée sur laquelle avance un personnage ou une mise en couleurs progressive, matérialisant le temps déjà passé et celui qui reste à venir, sont des possibilités parmi de nombreuses autres. À chaque cassure dans le temps, à chaque changement, le rappel à la journée type rassure l’enfant. Jour après jour, il construit ainsi sa représentation du temps.
Les règles structurent le groupe
Lors de l’accueil de l’enfant en maternelle, celui-ci intègre un groupe extérieur au clan familial et ce, la plupart du temps, pour la première fois. Lui qui était au centre des intérêts de la famille devient un individu comme les autres au sein du groupe en formation. Ceci est source de contrainte forte et à mettre en mots régulièrement pour lui permettre de se sentir rassuré. Par votre présence et votre posture, à la fois bienveillante et exigeante, vous faites naître le groupe et créez avec lui et chacun de ses membres une complicité. Vous initiez les règles de la classe, énonçant les droits, devoirs et interdits de chacun. Le groupe créé, structuré par des lois immuables devient à la fois cadre sécurisant et support d’apprentissages. La présence de règles, dont vous êtes le garant, permet l’autonomie de chacun dans le groupe. Cela est d’autant plus important que l’enfant ne peut s’autoriser à prendre la parole, à essayer que s’il est convaincu de la bienveillance du groupe à son égard.
Le statut de l’erreur
Une des difficultés à surmonter pour l’enfant qui entre en apprentissage, est le droit à l’erreur. Là encore, par vos postures, gestuelles et intonations, vous encouragez les essais, relativisez les erreurs, les expliquez et soulignez les réussites et progrès. Loin d’être infaillible, soulignez vos propres erreurs quand vous en faîtes et surmontez-les devant le groupe, rassuré.
Considérer chaque enfant individuellement
Le moment de l’accueil
Le moment de l’accueil est un moment crucial de transition pour l’enfant. L’accueillir individuellement, en lui souhaitant la bienvenue et en lui demandant comment il se sent, est indispensable. Cela lui signifie son importance, l’intérêt qu’on lui porte et le droit qu’il a d’exprimer son humeur et ses émotions du moment.
La place de l’objet transitionnel
Les premiers temps, les jeunes enfants ont parfois du mal à se séparer de leur tétine ou doudou. Qu’importe ! Si cet objet transitionnel leur permet d’être serein dans la classe. Vous pourrez les inviter à le poser pour les activités puis petit à petit ne l’autoriser que pour le moment d’accueil. Rassurés, les enfants le laisseront d’eux-mêmes le moment venu. Dans certaines classes maternelles, cela fait l’objet d’un projet.
Rassurer chaque membre du groupe
À tout moment, rassurer un enfant qui le nécessite est de grande importance pour lui mais également pour la classe. Les autres, voyant que vous êtes présent et bienveillant quand ça ne va pas trop, peuvent s’autoriser à s’ouvrir à leur tour. De plus, un enfant rassuré devient un appui solide pour le groupe et peut devenir un enfant qui rassure les autres.
Échanger avec les parents
La première scolarisation de l’enfant est également l’occasion d’une entrée en relation avec les parents. Eux aussi doivent être mis en confiance avec l’école, dès l’inscription, par une relation régulière et bienveillante avec vous car vous partagez désormais l’éducation de leur enfant. Quelques mots le soir sur le bon déroulement de la journée peuvent déjà poser les jalons d’une arrivée apaisée le lendemain. Quelques informations données le matin permettront de rassurer l’enfant au cours de la journée : présence à la cantine, qui vient le chercher, va-t-il à la garderie, etc. Ces informations peuvent aussi se passer par le biais d’un tableau, dans le cahier de liaison.
Et vous, avez-vous des astuces qui fonctionnent pour rassurer les petits en début d’année ?